Portrait : Daniel Travier, père de l’Écomusée des Vallées Cévenoles

Crédit photo entête d'article : Raymond Achilli

C’est à l’occasion de l’Assemblée générale annuelle de l’Association des Journalistes et Écrivains pour la Nature et l’Écologie (JNE) que nous avons découvert ce singulier personnage qui nous a accueillis dans SON magnifique musée dédié à la culture et aux traditions cévenoles.

Daniel Travier est né à Saint-Jean-du-Gard dans la même maison que les neuf générations qui l’ont précédé, en plein cœur de cette bourgade appartenant désormais à la communauté de communes du Grand Alès.

Plus jeune de huit années que ses frères, il a la chance durant son enfance de pouvoir profiter des récits de son grand-père Raoul, agriculteur – matelassier de son état, et conteur passionné de l’histoire cévenole. En outre, celui-ci l’initie à la langue du pays : l’occitan.

Dès l’âge de douze ans, il prend conscience que ses camarades n’auront pas accès à ce savoir et que la culture traditionnelle locale, si riche et unique, est en passe de tomber dans l’oubli.

Une évidence naît en lui : si sa génération veut savoir d’où elle vient, il va falloir transmettre ce qui lui est enseigné.

Son père, matelassier, lui aussi, ayant élargi son activité à l’ameublement, la tapisserie et la décoration, possède une maison secondaire dans la Vallée Borgne.

Le jeune Daniel y fréquente d’autres « anciens » désireux de transmettre leurs traditions à cet enfant, puis adolescent qui se passionne pour leur histoire et leurs traditions.

De culture protestante, il rencontre également le pasteur retraité Gaston Cadix, écrivain et érudit local, qui l’initie aux histoires cévenole et du protestantisme, le conduisant sur les lieux où se déroulèrent les faits d’armes de l’épopée des camisards (1702 – 1705).

À partir de l’âge de 13/14 ans, il commence à collecter divers objets : ustensiles domestiques, outils agricoles ou d’artisans, objets de culte, et des écrits : archives familiales, documents historiques…

Ce sont d’abord les objets provenant de sa famille ; notamment ceux que son père a réunis dans le cadre de sa profession, puis ceux provenant de la Vallée Borgne, qui constituent les premières pièces de sa collection.

Ci-contre, à droite, photo tirée de la Revue trimestrielle du Club Cévenol 123e année- N° 3-2018 - ©Club Cévenol

 

En 1969, il présente pour la première fois une exposition permanente à Saint-Jean-du-Gard.

En 1979, un local communal est mis à sa disposition et un premier musée y est inauguré en 1982.

En cette occasion un colloque sur les musées de société, alors nombreux, réunit une soixantaine de structures venant de toute la France, y compris de Corse, mais également du Val d’Aoste, des universitaires, et des représentants du Ministère de la culture.

Beaucoup de ces petits musées de société, ont disparu depuis, victimes d’un essaimage trop important, et d’un manque d’entretien les ayant rendus désuets ou inadaptés à la demande d’aujourd’hui.

Les locaux inaugurés en 1982 se révèlent rapidement trop exigus, manquant par exemple de salle dédiée aux publics scolaires, ou à des expositions temporaires.

Or, il se trouve que les frères de Daniel, arrivent à l’âge de la retraite et que se pose la question du devenir de Maison rouge, le bâtiment historique ayant abrité l’entreprise familiale, acquis en 1966 pour y abriter son activité.

Ce site remarquable, d’un point de vue architectural, ainsi que pour son histoire liée à la filature française de la soie, se révèle être le lieu idéal pour pouvoir accueillir un musée élargi et plus moderne.

Ci-dessous, photo tirée de la Revue trimestrielle du Club Cévenol 123e année- N° 3-2018 - ©Club Cévenol

 

Daniel Travier lance un projet en 2002 et le propose à Alès Agglo (dénomination de l’époque), ce qui permet d’inclure les communes de Mialet et de Saint-Jean-du-Gard à la Communauté de communes, et de rapprocher la ville d’Alès de l’entité « Cévennes ».

Commence alors la recherche de financements, notamment pour construire un bâtiment annexe, d’abord approuvée par le Président d’Alès aglo, lui-même cévenol, repoussée ensuite par les problèmes générés par les inondations historiques de 2002.

Daniel Travier se heurte également aux traditionnels écueils inhérents à la gouvernance « à la française », c’est-à-dire, l’émiettement des responsabilités mettant en avant les égos des différents maires, conseillers généraux et régionaux, combiné à des sensibilités politiques différentes, voire opposées…

L’État étant, quant à lui, désengagé des problématiques territoriales depuis de nombreuses années…

Engagé par Alès agglo pour mener à bien ce projet, et très impliqué avec le Parc National des Cévennes, il ne baisse pas les bras.

En 2010, fait inattendu, l’État dégage un gros budget pour financer soixante-dix musées.

L’une des conséquences en résultant est que la Région, le Département ou l’Europe ne peuvent plus assumer leurs diverses réticences…

La Région propose dans ce cadre deux projets, dont celui de Saint-Jean-du-Gard, et c’est ainsi que l’aventure peut se poursuivre jusqu’en 2017, date d’inauguration de l’Écomusée des Vallées Cévenoles.

Ci-contre, à droite, photo tirée de la Revue trimestrielle du Club Cévenol 123e année- N° 3-2018 - ©Club Cévenol

 

Il abrite aujourd’hui environ dix mille objets en présentation, avec des réserves, trente mille photos anciennes, et plus de vingt-cinq mille photos prises par Daniel Travier et ses amis de l’Association des Amis de la Vallée Borgne dans les années 70, ayant servi à la publication d’ouvrages.

Daniel Travier a assuré l’intégralité du projet scientifique et culturel durant les quinze années ayant conduit à la réalisation de ce musée, unique par son histoire et sa qualité ; et l’on peut affirmer que sans ce personnage aussi simple que passionné, ce dernier n’aurait jamais existé…

Dans un contexte de gouvernance peu favorable à ce type de réalisations, il a su affronter tous les obstacles avec sérénité, bénéficiant néanmoins d’éléments indispensables au succès de cette œuvre extraordinaire : les diverses transmissions orales reçues, les objets offerts ou ceux qu’il lui a été permis d’acquérir, l’espace de stockage indispensable proposé par son père, l’acquisition familiale d’un monument remarquable adapté, un entourage et des amitiés aussi dévoués à sa cause que lui-même…

Parmi ses amis, nous avons également rencontré Alain Renaux, membre des JNE, ethnobotaniste, maître d’œuvre du jardin du musée abritant deux-cent-cinquante espèces de plantes comestibles ou médicinales, élément qui complète admirablement l’ensemble de la réalisation.

Pour de plus amples informations : Maison Rouge Musée des Vallées Cévenoles : https://www.maisonrouge-musee.fr/

Ci-dessous : Image de la page de couverture de la Revue trimestrielle du Club Cévenol 123e année- N° 3-2018, dédié à la Maison Rouge et au Musée des Vallées Cévenoles.

©Club Cévenol

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Auteur : 
Jean-Pierre LAMIC

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